Venise (AFP) – La Mostra de Venise a décerné ce 10 septembre le Lion d’or à un documentaire fortement politique de Laura Poitras qui dénonce la tragédie des opiacés et le scandale aux États-Unis pour avoir délibérément alimenté la toxicomanie.

Le jury présidé par la comédienne Julianne Moore a décerné la plus haute distinction au travail de Poitras, 58 ans, basé sur la figure de la photographe et militante Nan Goldin, la reine de l' »underground » new-yorkais dans les années 70/80.

C’est la troisième fois consécutive qu’une femme reçoit le Lion d’or après la Française Audrey Diwan l’an dernier (« L’Événement ») et la Sino-Américaine Chloé Zhao (« Nomadland ») en 2020.

Le jury, qui comprenait le réalisateur et écrivain argentin Mariano Cohn, a récompensé une personnalité combative, qui a enquêté et dénoncé des sujets sensibles aux États-Unis, comme l’occupation de l’Irak et les horreurs de Guantanamo.

La réalisatrice a remporté son deuxième prix prestigieux après l’Oscar pour le documentaire « Citizenfour » (2015), produit avec le « lanceur d’alertes » Edward Snowden.

Avec le titre ‘All Beauty and Blood’, Poitras devient également la septième femme à recevoir le prestigieux Lion de Venise.

Le jury a voulu envoyer un autre message fort et politique en attribuant le Prix spécial au réalisateur iranien Jafar Panahi, détenu dans son pays pour avoir protesté contre l’arrestation de deux collègues par le régime islamiste.

Dans ‘No Bears’ (‘Les ours n’existent pas’), le cinéaste, qui avait déjà été primé à Venise en 2000 pour ‘Le cercle’, se moque de la censure et dresse en même temps un portrait de sa condition d’artiste persécuté.

Grandes stars, claque pour Netflix

Venise, qui ces dernières années a été un tremplin pour une carrière réussie aux États-Unis, a cette fois laissé sans prix les blockbusters de Netflix, qui ne sortent pas en salles. Parmi les films ignorés figure « Bardo », du Mexicain Alejandro González Iñárritu, qui a divisé la critique.

Le deuxième prix en importance, le Lion d’argent, a été décerné à la réalisatrice française Alice Diop, de parents sénégalais, pour « Saint Omer », un film sur la maternité, la solitude, la dépression post-partum, basé sur des faits réels, un procès pour infanticide en nord de la France.

‘Saint Omer’ a également remporté le Lion du Futur du meilleur premier film.

Deux stars hollywoodiennes, l’Australienne Cate Blanchett (‘Tar’) et l’Irlandais Colin Farrell (‘The Banshees of Inisherin’), ont reçu les prix de la meilleure actrice et du meilleur acteur.

Le prix pour Farrell, 46 ans, marque une sorte de reconversion artistique de l’acteur dans le cinéma d’auteur.

Blanchett, 53 ans, a conquis le Lido en mettant sa renommée et son talent au service de la lutte féministe avec sa prestation de chef d’orchestre dans ‘TAR’ de Todd Field, un drame sur l’abus de pouvoir, l’homosexualité féminine, l’éthique et les préjugés, une sorte de ‘Me Too’ dans une touche féminine.

Ne figure pas sur la liste des lauréats l’émouvant « Argentine, 1985 », de l’Argentin Santiago Mitre, avec un Ricardo Darín salué dans le rôle du procureur Julio Strassera, chargé du procès contre les juntes militaires (1976-1983).

Le jury de la section Horizontes, la plus innovante du concours, a plutôt récompensé le scénario du film ‘Blanquita’, du Chilien Fernando Guzzoni, basé sur l’histoire vraie d’un puissant réseau de pédophiles au Chili.

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