Syndrome d’Asperger et scolarisation, la difficile conciliation

Les enfants et adolescents atteints du syndrome d’Asperger, un trouble du spectre autistique, ont souvent du mal à trouver une structure scolaire adaptée à leurs besoins. Ecoles spécialisées trop rares, méconnaissance du handicap, absence d’accompagnants… Leur scolarisation peut se transformer en véritable parcours du combattant. 

Une atmosphère de fin de vacances règne chez Nathalie, énergique quinquagénaire vivant en banlieue parisienne et mère de trois enfants. Son aîné, Aurélien*, rentre tout juste d’un stage de plongée sous-marine en Méditerranée. Il est assis sur le canapé du salon, absorbé par un roman de science-fiction.

« Aurélien, tu as mis ton linge sale dans le panier ? », lance alors sa mère depuis la salle de bains. Un grognement étouffé fait office de réponse. « Il est parti dans son monde, explique affectueusement Nathalie. Impossible de l’en faire sortir sauf s’il le décide ! »

Le soulagement du diagnostic

Cette faculté d’occulter son entourage, ainsi que l’intérêt prononcé d’Aurélien pour un sujet particulier (l’océanographie), sont deux traits typiques des personnes atteintes du syndrome d’Asperger, un trouble du spectre autistique qui touche les facultés sociales. Les « Aspies », nom choisi par les membres de la communauté, ont aussi des difficultés à interpréter les expressions faciales, les intonations vocales, à décrypter le second degré, et peuvent souffrir d’hypersensibilité aux bruits ou à la lumière.

« J’ai vite compris qu’il était différent, dès son entrée en maternelle, raconte Nathalie, assise aux côtés de son fils. Les autres élèves l’évitaient car il pouvait être violent : quand les mots lui manquent pour s’exprimer, il passe aux gestes. Les enseignantes ont eu du mal à le comprendre, à le cerner. Il a fini par refuser d’aller à l’école et nous l’avons conduit chez un psychologue. »

Aurélien a huit ans, le diagnostic est alors posé . « A l’époque, se souvient sa mère, le syndrome était très peu connu et nous n’avons même pas pensé à demander une auxiliaire de vie scolaire [AVS, NDLR]. Mais je me tenais au courant sur Internet et, quand j’ai appris que c’était possible, j’ai monté un dossier. Aurélien a pu bénéficier d’une AVS pour son entrée au collège. »

CLIS et AESH, des solutions rares et pas toujours adaptées

Les auxiliaires de vie scolaire, désormais appelées accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH), sont souvent indispensables aux enfants et adolescents présentant des troubles de l’apprentissage et du développement. Mais, elles sont rares et mal réparties sur le territoire. A la rentrée 2015, des dizaines d’enfants se sont retrouvés sans AESH, à l’image de Soren, 8 ans, dont la maman confie son désarroi à La Voix du Nord.

« Nous avons eu beaucoup de chance, reconnaît Nathalie, la mère d’Aurélien. Nous avons aussi les moyens d’offrir à Aurélien une aide aux devoirs, trois fois par semaine, ce qui m’évite d’être toujours derrière lui. Et surtout, une scolarité dans une école nouvelle, aux méthodes pédagogiques expérimentales, tout près de chez nous. Là, il est libre d’apprendre ce qu’il souhaite, à son rythme. Nous voulions absolument qu’il reste dans un cursus normal, avec des élèves neurotypiques – qui ne sont pas atteints par un trouble autistique. »

Faute d’AESH ou de structures plus adaptées, certains enfants Aspies sont en effet scolarisés dans des CLIS (classes locales d’insertion scolaire), destinées spécifiquement aux élèves en difficulté. Ce fut le cas, rapporté par le Courrier Picard, de Steven. Diagnostiqué à 12 ans, il est inscrit dans la CLIS de son collège. L’expérience n’est pas concluante, le garçon s’ennuie. On l’envoie dans un autre établissement, avec une AESH cette fois. Encore raté. « Nous ne sommes pas adaptés à ce genre d’autisme », justifie l’administration. 

Une réponse gouvernementale

Aux parents inquiets, voire désarmés, qui choisissent parfois l’expatriation en Belgique, ou la création d’écoles indépendantes, la ministre de la Santé Marisol Touraine a répondu avec le lancement en 2013 du « Plan Autisme », d’envergure quinquennale. Au programme notamment, la formation des enseignants et professeurs ainsi que le développement des centres d’accueil.

Un engagement renouvelé par la secrétaire d’État aux personnes handicapées Ségolène Neuville en avril dernier, lors d’un bilan à mi-étape du plan: « Les moyens financiers sont là, les orientations sont claires, les outils et référentiels existent. Il faut maintenant élever le niveau global de qualité des réponses pour être à la hauteur des attentes des personnes et des familles. »

A lire également