Ngozi Okonjo-Iweala, une “battante” à la tête de l’OMC

Ngozi Okonjo-Iweala, une “battante” à la tête de l’OMC

Pour la première fois, l’Organisation mondiale du commerce sera dirigée par une femme, Ngozi Okonjo-Iweala. À 66 ans, l’ancienne ministre du Nigeria a une nouvelle bataille à mener : sauver une institution paralysée et discréditée.

Même pour une brillante économiste, “il y a beaucoup de très grands nombres dans la vie de Ngozi Okonjo-Iweala”, souligne The Guardian dans un portrait de la première femme du continent africain nommée à la tête de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

Elle a supervisé des millions de vaccinations d’enfants lorsqu’elle était à la tête de l’Alliance pour les vaccins, le Gavi. À la Banque mondiale, elle a brassé “81 milliards de dollars d’opérations” puis s’est “attaquée à la dette de 30 milliards de dollars du pays le plus peuplé d’Afrique” quand elle était ministre des Finances du Nigeria. “Et elle compte 1,5 million de followers sur Twitter.”

Mais il y a aussi “beaucoup de petits nombres” dans la vie de cette femme de 66 ans : la vingtaine d’ONG qu’elle accompagne, les grandes banques, les entreprises qu’elle a conseillées, tout comme “la vingtaine de prix” qu’elle a gagnée et les dizaines de rapports, les livres” qu’elle a rédigés. Et puis il y a “ces multiples classements” dont elle fait partie : “Les 100 femmes les plus puissantes, les 100 personnalités les plus influentes au monde, les 10 femmes les plus puissantes d’Afrique…”

Moment critique

Ce lundi, elle rejoint la liste des directeurs généraux de l’OMC, “poste qui n’a jamais été occupé ni par un Africain ni par une femme”, souligne le quotidien britannique. Forte d’un budget de 220 millions de dollars et de 650 collaborateurs, l’organisation vit “un moment critique”. La Nigériane devra mobiliser tous ses acquis pour tenter de “réparer le système commercial mondial dont l’OMC est le cœur”.

Ngozi Okonjo-Iweala a 6 ans quand son pays fête son indépendance en 1960, et 13 ans quand la guerre du Biafra le déchire – “Je mangeais un repas par jour et les enfants mouraient, j’ai donc appris à vivre très frugalement”, disait-elle l’an passé au magazine Forbes. Après la guerre, elle part étudier l’économie aux États-Unis, à Harvard et au Massachusetts Institute of Technology, se marie et commence à travailler pour la Banque mondiale dès l’âge de 25 ans. Elle ne quittera cette institution qu’en 2003, pour devenir ministre des Finances.

Au Guardian en 2005 elle disait :

On m’a surnommée Okonjo-Wahala, ‘je te fais l’enfer’. Mais je me fiche des noms que l’on me donne. Je suis une combattante ; je suis très concentrée sur ce que je fais et implacable dans ce que je veux accomplir.”

Elle s’est attaquée à l’immense dette nigériane en “convainquant les puissances occidentales, sceptiques, de prêter secours”, même si certains observent que ses promesses de croissance économique et de création d’emplois n’ont pas toutes été tenues.

Le poste le plus exposé de sa carrière

Avec l’élection de Joe Biden aux États-Unis, l’opposition de Donald Trump à sa nomination par consensus à la tête de l’OMC a été levée. Elle sera à un poste “bien plus exposé et plus influent” que tout ce qu’elle a connu par le passé.

L’OMC est fragilisée et critiquée “depuis des décennies” pour n’avoir rien pu faire contre les ravages de la mondialisation, rappelle le quotidien britannique. Les subventions agricoles sont un des points de crispation. “Elle n’a pas scellé d’accord commercial multilatéral majeur depuis des années”, et n’a pas aidé non plus à lutter contre la surpêche ou à “gérer le far-west du commerce électronique”… Sans oublier les défis de la pandémie de Covid-19.

À CNN, Ngozi Okonjo-Iweala a déclaré :

L’OMC a besoin d’un regard neuf, d’un nouveau visage, d’un étranger, d’une personne capable de mettre en œuvre des réformes et de travailler de concert avec les [pays] membres pour s’assurer qu’elle sorte de la paralysie partielle dans laquelle elle se trouve.”

Sur Twitter, à ses millions d’abonnés, elle disait la semaine dernière qu’elle avait hâte de “finaliser le processus” de l’élection à l’OMC. “Nous avons un travail capital à accomplir ensemble.”

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