L’Algérie a appelé son ambassadeur en France pour des consultations après ce qu’elle a qualifié de propos « irresponsables » attribués à Emmanuel Macron. Le président français a estimé lors d’une rencontre avec des descendants des protagonistes de la guerre d’Algérie qu’après son indépendance en 1962, l’ancienne colonie s’était construite sur « une déchirure de mémoire », entretenue par « le système politico-militaire ».

L’Algérie a décidé samedi d’appeler son ambassadeur en France, Mohamed Antar-Daoud, « pour consultations », a annoncé la télévision d’Etat. « L’Algérie appelle son ambassadeur à Paris pour des consultations et une déclaration sera publiée à cet égard », a-t-il déclaré sur la chaîne, précisant qu’une autre déclaration explicative suivrait.

Pour justifier cet appel, la présidence algérienne a évoqué les déclarations du président français Emmanuel Macron : « Suite aux déclarations indéniables que diverses sources françaises ont attribuées nommément au président de la République française, l’Algérie exprime son refus catégorique d’une ingérence inadmissible dans ses affaires intérieures qui de telles déclarations constituent « .

Ces déclarations auraient été, selon les médias algériens, faites par le président français lors d’une rencontre jeudi avec des descendants de protagonistes de la guerre d’Algérie, visant précisément à calmer « cette blessure commémorative ».

« Rien ne peut absoudre les puissances coloniales de leurs crimes »

Au cours de ce débat, relaté par le journal français Le Monde, Emmanuel Macron a estimé qu’après son indépendance en 1962, l’Algérie s’était construite sur « une déchirure de mémoire », entretenue par « le système politico-militaire ». Le président a également évoqué « une histoire officielle », selon lui, « totalement réécrite » qui « n’est pas basée sur des vérités » mais sur « la haine de la France ».

Le président français Emmanuel Macron lors d'une cérémonie à la mémoire des Harkis, les Algériens qui ont aidé l'armée française dans la guerre d'indépendance algérienne, à l'Elysée à Paris, le 20 septembre.
Le président français Emmanuel Macron lors d’une cérémonie à la mémoire des Harkis, les Algériens qui ont aidé l’armée française dans la guerre d’indépendance algérienne, à l’Elysée à Paris, le 20 septembre. © GONZALO FUENTES / EFE

L’Algérie a déclaré que ces propos « constituent une atteinte intolérable à la mémoire des 5,63 millions de braves martyrs qui ont sacrifié leur vie dans leur résistance héroïque à l’invasion coloniale française et à la glorieuse Révolution de libération nationale ».

« Cette intervention malheureuse contredit fondamentalement les principes qui devraient régir toute coopération algéro-française en matière de mémoire », a déclaré la présidence algérienne, estimant que « rien ni personne ne peut absoudre les puissances coloniales de leurs crimes, y compris les massacres du 17 octobre à Paris, que l’Algérie et sa communauté de France s’apprêtent à commémorer dignement.»

Un précédent en mai 2020

Les relations entre Paris et Alger étaient déjà tendues. Mercredi, l’ambassadeur de France à Alger, François Gouyette, a été convoqué au ministère algérien des Affaires étrangères pour lui notifier « une protestation formelle du gouvernement », suite à la décision de Paris de réduire de moitié le nombre de visas accordés aux Algériens. qui souhaitent voyager en France.

Le ministère algérien des Affaires étrangères a qualifié la mesure de « décision unilatérale du gouvernement français », qui selon la France répond au refus des gouvernements maghrébins d’accueillir les immigrés clandestins envoyés par Paris.

En revanche, c’est la deuxième fois qu’Alger convoque son ambassadeur à Paris depuis mai 2020. A cette époque, l’ambassadeur, Salah Lebdioui, avait fait l’objet d’un retrait « immédiat » après la diffusion d’un documentaire sur le mouvement de protestation pro-démocratie Hirak, diffusé par France 5 et la chaîne parlementaire.

Avec l’AFP, Reuters et les médias locaux

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