Le dernier Compagnon de la Libération, Hubert Germain, est décédé à l’âge de 101 ans. Ce membre des Forces françaises libres sera inhumé dans la crypte du Mémorial de la France combattante au Mont-Valérien, près de Paris, le 11 novembre, lors d’une cérémonie nationale présidée par Emmanuel Macron.

Il n’y a plus de Compagnons de Libération. Le dernier membre de cet ordre créé par le général de Gaulle en 1940, Hubert Germain, est décédé mardi 12 octobre à l’âge de 101 ans.

« Tout d’abord, je voudrais vous informer du décès d’Hubert Germain, notre dernier Compagnon Vivant de la Libération (…) C’est un moment important de notre histoire », a annoncé la ministre de la Défense, Florence Parly, lors d’une audition. devant la Commission de défense du Sénat.

« La flamme qui s’était allumée à l’été 1940, lorsqu’il avait rejoint les rangs de la France libre, était encore vive dans ses yeux, emplie d’admiration lorsqu’il évoquait le général de Gaulle, et brouillée de larmes lorsqu’il racontait ses retrouvailles avec la France en août. 1944 », a réagi l’Élysée dans un communiqué. « Le dernier Compagnon de la Libération, Hubert Germain, est décédé aujourd’hui, après avoir vécu et incarné un siècle de liberté. »

Avec sa mort, une page de l’histoire se tourne. « Quand le dernier d’entre nous mourra, la flamme s’éteindra. Mais il y aura toujours des braises », écrit cet ancien résistant dans ses mémoires intitulés « Espérer pour la France » (éditorial Belles Lettres).

« Nous gagnerons la guerre »

Fils d’un officier général des troupes coloniales, Hubert Germain est né le 6 août 1920 à Paris. Après avoir terminé ses études secondaires, il prépare le concours d’entrée à l’École navale du lycée Michel Montaigne de Bordeaux, lorsque la guerre est déclarée en septembre 1939. Quelques mois plus tard, après la débâcle de mai 1940, il décide de continuer le combat.

Puis, à Saint Jean de Luz, il embarque sur un navire transportant des soldats polonais vers l’Angleterre et arrive à Londres le 24 juin 1940, où il rencontre le général de Gaulle. « Après avoir pris connaissance de ma carrière, il m’a expliqué où il allait m’envoyer pour continuer ma formation et m’a dit : ‘Je vais en avoir besoin.’ Quand, à 19 ans, l’homme qui a pris les rênes de la nation vous a dit que, Votre poitrine se remplit de fierté ! J’ai tout de suite compris qu’avec Churchill, de Gaulle et moi nous allions gagner la guerre ! », décrit-il malicieusement dans sa biographie.

Dès ses débuts, il s’engage dans les Forces françaises libres et est affecté sur le cuirassé Courbet, où il suit des cours d’officier de marine. Au printemps 1941, il est affecté à l’état-major du général Legentilhomme, qui commande la 1re division légère de la France libre destinée à intervenir au Levant. Germain a combattu en Syrie et en Libye, où il a participé aux combats de Bir Hakeim, et même en Egypte. Ces combats ont touché ce jeune soldat : ​​« Au début, vous y allez avec volonté et courage. vous engourdissez.

Hubert Germain (au centre) en juin 1943 à Tunis avec le général de Gaulle et le capitaine Gabriel Brunet de Sairigné pendant la campagne de Tunisie.
Hubert Germain (au centre) en juin 1943 à Tunis avec le général de Gaulle et le capitaine Gabriel Brunet de Sairigné pendant la campagne de Tunisie. © AFP

En Italie, le 24 mai 1944, à Pontecorvo, commandant une section antichar, le lieutenant Germain est blessé sur le flanc alors qu’il dirige le feu des mitrailleuses lourdes de sa section, pour continuer à soutenir le bataillon attaquant le long de la rivière Liri . Evacué à Naples, le général de Gaulle le décore de la Croix de la Libération en Italie fin juin 1944. « Le ciel vous tombe dessus. Jamais je ne pense à ça. Il s’était bien battu, mais il n’avait pas travaillé pour cela. Cela ne m’intéressait pas », a déclaré modestement cet homme, qui portait également dans son corps quelques fragments de cette bataille.

« Vous êtes rentré en France !

Quelques semaines plus tard, en août 1944, il participe au Débarquement de Provence. Quatre ans après son départ pour l’Angleterre, il retourne enfin dans son pays. « Vous atterrissez, vous atterrissez, vous faites quelques pas et vous tombez, la terre vous absorbe, la plage. Et à ce moment-là, vous tombez à genoux et pleurez. Pas longtemps, car il ne faut pas perdre de temps, mais on s’essouffle. » s’est-il souvenu lors d’une interview pour LCI. « Et puis je me suis dit : ‘Tu es rentré en France ! La France ne t’appartient pas, ce n’est pas ta France, mais ce soir ce sera la mienne.

Il participe ensuite aux campagnes des Vosges et d’Alsace et termine la guerre dans les Alpes du Sud, dans le massif de l’Authion. Après la guerre, le dirigeant d’alors d’une entreprise chimique s’est impliqué dans la politique. Il est d’abord élu maire de Saint-Chéron, dans l’Essonne, en 1953, puis député de Paris en 1962. Il est également ministre des Postes et Télécommunications (1972-1974) puis ministre chargé des relations avec le Parlement (mars-mai de 1974).

Député Hubert Germain en juillet 1972 avant une rencontre avec le Premier ministre Pierre Messmer.
Député Hubert Germain en juillet 1972 avant une rencontre avec le Premier ministre Pierre Messmer. © AFP

Ces dernières années, Hubert Germain a continué à partager son témoignage. Avec lui il portait inlassablement le souvenir de ses camarades : « Il vient un jour où il ne te reste plus que le respect qu’il faut avoir pour tous ceux qui se sont sacrifiés et dont on ne parle plus. Tous ceux que j’ai tués, même sans le savoir elle aussi. Je les porte dans mes prières. Ceux que je n’ai pas pu aider aussi. Mon devoir aujourd’hui est de penser à eux, au moment même où certains d’entre eux ont été oubliés par leurs familles. « 

Dernier survivant des 1038 compagnons de la Libération, Germain avait la possibilité d’être enterré dans la crypte du monument à la France combattante au Mont-Valérien, dans les Hautes-Seine. Et donc il le voulait.

Une cérémonie le 11 novembre

Son corps reposera dans le caveau numéro 9 de ce monument érigé en hommage aux combattants, résistants et déportés français de la Seconde Guerre mondiale. Il y sera inhumé le 11 novembre lors d’un hommage national présidé par Emmanuel Macron. Plus tôt, lors d’une cérémonie qui se tiendra dans les prochains jours aux Invalides, le chef de l’Etat rendra hommage au dernier Compagnon de la Libération, qu’il a qualifié de « personne de premier plan de la France libre ».


Hubert Germain rejoindra les 16 personnes décédées pour la France entre 1939 et 1945, représentant ainsi toutes les formes d’engagement et les différents sites de combat de ce pays. Ils sont composés de 11 militaires (dont deux tirailleurs d’Afrique du Nord, deux tirailleurs d’Afrique noire et trois membres des Forces françaises libres) et de cinq résistants (dont un membre des Forces françaises de l’intérieur du Vercors et un résistant indochinois ).

Quatre-vingts ans après la création de l’Ordre par le général de Gaulle, son dernier représentant n’est plus, mais le souvenir de cet engagement vivra. « Nous étions ces braises ardentes et l’Ordre de la Libération s’est donné pour mission de garder ces braises ardentes comme témoignage de cette époque », a réitéré Hubert Germain.

Ce texte a été adapté de son original en français.

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