OpenLux entrouvre le coffre-fort du Luxembourg

OpenLux entrouvre le coffre-fort du Luxembourg

Le grand-duché attire les multinationales et les riches étrangers grâce à ses structures d’entreprise opaques et à un taux d’imposition ultra-favorable. Et il reste un paradis fiscal, comme le montrent les millions de documents épluchés par seize médias de plusieurs pays.

Ils sont seize journaux, dont Le Monde en France, Le Soir en Belgique, la Süddeutsche Zeitung en Allemagne, à avoir enquêté sur la face cachée du Luxembourg à partir d’une base de données partagée sur le paradis fiscal. Le titre de la Süddeutsche Zeitung résume l’enquête OpenLux : “Petit pays, gros sous”.

“Près de 4 millions de documents liés à des sociétés luxembourgeoises” lèvent le voile sur le riche duché qui compte “une société pour 4,3 habitants”, souligne Le Soir. “Dans près d’un cas sur deux, il n’est pas possible de trouver les vrais propriétaires” des 140 164 sociétés actives enregistrées au Luxembourg au 31 décembre 2020. Elles sont toutes inscrites au registre des bénéficiaires effectifs (RBE), dont l’accès a été rendu public en 2019 par le Luxembourg pour faire face aux critiques récurrentes sur la boîte noire des investissements dans le royaume, réputé être un paradis fiscal.

OpenLux permet de croiser “des sportifs de premier plan, des artistes, des milliardaires, des familiers d’hommes et de femmes politiques étrangers, des personnes suspectées d’activités criminelles”, poursuit le quotidien belge. Mais aussi de “pointer du doigt un vendeur d’armes cité dans l’affaire Karachi, un citoyen russe soupçonné de diriger une organisation criminelle, un homme d’affaires turc suspecté par les États-Unis d’être lié à une vaste fraude fiscale…”.

Les enfants du capital

On y découvre que 33 des 100 premières fortunes mondiales selon le classement du magazine Forbes “apparaissent sous leur vrai nom dans une société du Luxembourg”, ou encore que “plus de 300 mineurs d’âge sont actionnaires de sociétés luxembourgeoises”, énumère Le Soir.

L’enquête met au jour ces sociétés derrière lesquelles se cachent des célébrités, à l’instar de Quimicum SARL pour le château Miraval, le domaine viticole provençal propriété de Brad Pitt et d’Angelina Jolie, fait observer la Süddeutsche Zeitung. Le journal ajoute :

Le golfeur américain Tiger Woods et la chanteuse colombienne Shakira, le roi de Bahreïn et l’émir d’Abou Dhabi apparaissent également comme actuels ou anciens propriétaires d’entreprises luxembourgeoises.”

Tout comme des “centaines de multinationales telles qu’Amazon, Pfizer, Pepsi ou Fedex”.

Et toutes les célébrités interrogées par le quotidien de Munich répondent que les “raisons fiscales n’ont aucune importance” dans leur choix d’immatriculer leur société au Luxembourg. On se demande bien “quoi d’autre” peut les motiver, ironise le média.

Contrairement aux promesses de “changement, de transparence et d’amélioration” de la façon luxembourgeoise de “gérer l’argent des autres”, assène la Süddeutsche Zeitung, “un paradis fiscal reste un paradis fiscal”.

Certes, depuis 2014 et les premières révélations des LuxLeaks, “le nombre d’accords clandestins grâce auxquels le Luxembourg a permis aux entreprises d’adopter des stratagèmes absurdes d’évasion fiscale a considérablement diminué”. Cependant, chaque année, d’autres “pays perdent des milliards d’euros parce que l’argent est transféré au Luxembourg”. Et la prétendue transparence ne change rien au “modèle luxembourgeois” selon lequel “il vaut mieux peu d’impôts prélevés sur beaucoup que beaucoup sur quelques-uns”.

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