On se prend un kebab…gastronomique ?

Panique. Il manque les deux samoussas commandés avec le kebab. Stéphane, le serveur, se précipite. « Je suis sincèrement désolé, je vous en offre deux de plus ! » explique-t-il sans hésiter, joignant les mains en signe d’excuse. Ici, on bichonne les clients. Le couple de trentenaires n’est pas venu à Our Kebab par hasard. Ce qu’ils cherchent, c’est le haut de gamme.

De discrètes lettres lumineuse épèlent « j’aime le kebab » sur un mur quand les clients entrent dans le restaurant. Entre les tables en bois, et les couverts joliment disposés, il est possible de commander un kebab bourguignon. Oui, à base de boeuf bourguignon. Il est même possible de l’accompagner d’un verre de vin, moyennant un supplément. Stéphane sert les clients avec attention. En fond, la playlist égrène du Jamie XX, des morceaux d’électro minimale. Ronelito, le cuisinier de 24 ans, jongle avec ses ingrédients pour finir la prochaine commande. Tout ce qu’il utilise, ce ne sont que des produits frais. « Et tu le sens sur le bide ! » appuie Stéphane. Pourtant, il n’est même pas un connaisseur du kebab. Pour lui, ce n’était rien de plus qu’un casse-croûte « post-cuite ». Mais depuis qu’il sert ici, il note une réelle différence de goût. Des produits qu’il juge d’exception.

« Notre produit spécifique, c’est le kebab sans gluten » précise Stéphane. Et des gens viennent même de loin pour profiter de cette nouveauté dont ils ont le secret. L’instigateur de cette tendance, c’est Damien Schmidt. Il est patron de Our Kebab. Lancé dans cette aventure depuis quelques années, il n’oublie pourtant pas d’où lui vient cette inspiration. Un an d’armée, suivant son diplôme en école de commerce. Il a traversé le Liban, la Jordanie, la Turquie, parmi d’autres. A chaque fois, il retrouvait ce qui avait rythmé ses années étudiantes. Le kebab. Mais pas n’importe quel sandwich. « Le kebab c’est un art qui vise à valoriser des produits difficiles à consommer ». C’est cette noblesse du kebab qu’il a voulu apporter en France. Une réinvention. Agacé, presque inquiet par la viande surgelée qui pullule dans de nombreux restaurants lambdas, il a lancé Our Kebab. Mais à quel prix ?

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Our Kebab, rue de Paradis, dans le 10ème arrondissement de Paris, le 22 février 2016. Crédit : Lucas Minisini

Sept euros pour un sandwich. Et une clientèle quasiment entièrement composée de cadres supérieures. « Je ne suis pas un produit de luxe ! » pointe Damien. Mais il concède tout de même que la clientèle de quartier – le Xème arrondissement de Paris – reste ses habitués les plus fidèles. Stéphane derrière le comptoir, partage la même constatation. « Ce sont des gens qui peuvent se le permettre. Moi par exemple, je ne pourrais pas ! ». Mais il pense bon de préciser que leurs prix ne sont pas plus élevés que ceux de McDo par exemple, pour une qualité bien différente.

Ce lundi soir de fin février, seuls deux personnes sont dans la salle. Mais le modèle marche. Damien Schmidt est à Nantes pour l’ouverture d’un nouveau restaurant de la même marque. A Saint-Lazare, Our Kebab a fait ses preuves. Arrivés en 2010 sur le marché, ils ne font pas face à une concurrence carnassière.

Kebab gastronomique, horaire de restaurant gastronomique. Le lundi, le kebab ferme aux alentours de 22 heures. Ronelito, le cuisinier, expérimente un nouveau plat comme à son habitude. Ce soir, c’est boeuf bourguignon, ail, frites – « parce que je n’avais plus de pomme de terres » se justifie-t-il – et du fromage turc. Un repas haut de gamme, comme toujours.

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