Les législateurs français ont rejeté une motion de censure contre le Premier ministre, demandée par la coalition de gauche NUPES. Cela survient à un moment où le président est sous pression après des allégations selon lesquelles il aurait soutenu la candidature d’Uber lorsqu’il était ministre de l’Économie de 2014 à 2016.

Ce lundi 11 juillet, la Première ministre française, Elisabeth Borne, a confortablement surmonté la motion de censure présentée contre elle par l’alliance de gauche Nouvelle Union populaire écologique et sociale (NUPES).

Le décompte officiel des voix a montré que seuls 146 législateurs sur les 577 députés de l’Assemblée nationale ont voté en faveur de la motion, loin des 289 voix nécessaires pour précipiter la chute du gouvernement.

Bien que Borne soit à la tête d’un gouvernement minoritaire, elle avait le soutien de certains partis d’opposition qui sont également contre les gauchistes et ne les ont pas rejoints lors du vote, comme les Républicains conservateurs et l’extrême droite Association nationale de Marine Le Pen.


Une vue générale montre l'hémicycle alors que Mathilde Panot, députée et présidente du groupe parlementaire du parti d'extrême gauche français La France Insoumise (France incrédule), prononce un discours lors d'un débat sur une motion de censure contre le gouvernement français présentée par les partis de l'opposition, à l'Assemblée nationale à Paris, France, le 11 juillet 2022.
Une vue générale montre l’hémicycle alors que Mathilde Panot, députée et présidente du groupe parlementaire du parti d’extrême gauche français La France Insoumise (France incrédule), prononce un discours lors d’un débat sur une motion de censure contre le gouvernement français présentée par les partis de l’opposition, à l’Assemblée nationale à Paris, France, le 11 juillet 2022. © Sarah Meyssonnier/Reuters

Borne a été nommée en mai Premier ministre de la France par le président Emmanuel Macron un mois avant les élections législatives au cours desquelles le parti centriste au pouvoir a perdu sa majorité, elle ne peut donc plus compter sur la chambre basse pour sceller son programme de réformes.

Aujourd’hui, Macron et son gouvernement sont obligés de négocier la législation projet par projet, ce qui leur enlève un certain contrôle sur le processus.

Le vote intervient à un moment où les critiques de Macron au Parlement remettent en question ses relations étroites avec Uber et les lobbyistes d’affaires après qu’une enquête médiatique internationale a révélé les détails de ses conversations avec les dirigeants d’Uber lorsque Macron était ministre de l’Économie de la France.

Accusations contre la France Insumisa

Au cours du débat, qui a duré environ trois heures, le Premier ministre français a accusé France Insumisa (LFI) de perdre du temps parlementaire.

« Mesdames et Messieurs, aujourd’hui, nous pourrions travailler pour le bien des Français », a déclaré Borne au Parlement avant le vote, mais « au lieu de cela, nous débattons d’une motion de censure fondée sur mes intentions supposées, et interfère avec le travail du Parlement et donc avec la volonté des Français ».

Pour Borne, la motion de censure était une « tactique politique » de législateurs « en colère contre l’histoire » parce qu’ils ne sont plus au pouvoir.


La Première ministre française Elisabeth Borne prononce un discours lors d'un débat sur une motion de censure contre le gouvernement français déposée par les partis d'opposition, à l'Assemblée nationale à Paris, France, le 11 juillet 2022.
La Première ministre française Elisabeth Borne prononce un discours lors d’un débat sur une motion de censure contre le gouvernement français déposée par les partis d’opposition, à l’Assemblée nationale à Paris, France, le 11 juillet 2022. © Sarah Meyssonnier/Reuters

Pour sa part, la dirigeante d’extrême droite Marine Le Pen, qui a perdu face à Macron lors des deux dernières élections présidentielles françaises et farouche opposante aux gauchistes, a dénoncé la motion de censure comme une manœuvre politique visant à « faire s’effondrer la Ve République ». « 

Pourtant, Le Pen a déclaré que son parti du Rassemblement national, le plus grand parti d’opposition de droite avec 89 sièges au parlement, utiliserait « tout le pouvoir disponible dont nous disposons contre le gouvernement ».

De son côté, Ariane Bogain, de l’université de Northumbria, a estimé que le but de la motion était de montrer que la NUPES, la coalition politique à laquelle appartient LFI, est « la seule véritable opposition à Macron ».

Les fuites d’Uber mettent la pression sur Macron

Le vote de lundi est intervenu à un moment où le président français est sous pression pour expliquer les allégations d’enquêtes d’un consortium de médias, dont le journal français « Le Monde », qui affirment qu’il a eu plusieurs réunions non signalées avec des dirigeants de l’application de taxi Uber lorsqu’il était Ministre de l’Economie de 2014 à 2016.

Un « accord secret » aurait impliqué la promesse de Macron d’aider Uber à contourner la législation introduite en 2014, qui visait à réglementer les nouveaux services de taxi basés sur des applications.

Les accusations ont alimenté la colère des détracteurs de Macron. Le député du Parti communiste Fabien Roussel a déclaré que la France a « un président de la république qui veut imposer un modèle (d’affaires) américain ».

Mais les alliés de Macron rejettent les accusations selon lesquelles il aurait fait quoi que ce soit de mal.

« Il est surprenant que le pays soit offensé que le ministre de l’Economie ait rencontré des hommes d’affaires », a déclaré au Parlement Aurore Berge, chef du parti Renaissance de Macron.

Pendant ce temps, Alexis Corbière, du parti France Insumisa, a appelé à une enquête parlementaire sur les fuites. Il a indiqué qu’il considère « très sérieuse l’idée qu’avec » le supposé pacte secret, « M. Macron ait dérégulé la réglementation du secteur des taxis ».

Uber opère en France depuis 2011. Son apparition a déclenché une réaction furieuse des syndicats de taxis français et des années de batailles juridiques sur la réglementation et la protection de ses chauffeurs.

Avec AP, AFP et Reuters

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