Le café: prochain produit cancérigène sur le radar de l’OMS

Depuis la polémique lancée il y a une semaine par le dernier rapport de l’OMS, beaucoup se demandent que pouvons-nous toujours manger sans risques pour la santé ? Après la cigarette, dont les périls sont déjà bien connus de tous, l’alcool et la viande rouge, c’est maintenant le tour d’encore un bien primaire de consommation.

        Tweet de Fabienne Sintes, journaliste de la matinale France Info.

À peine quelques jours plus tard, l’#OMS rajoute en effet de l’huile sur le feu en annonçant que sa prochaine cible d’étude sera un autre aliment incontournable de notre quotidien : le café. Vous pensiez que votre expresso matinal était intouchable ? Et non, puisque selon l’agence ANSA, le #café est bien le sujet du prochain rapport du CIRC, le Centre International de Recherche sur le Cancer de l’OMS, qui devrait paraître fin mai 2016.

Nous avons voulu vérifier les accusations faites à notre boisson énergisante préférée. Pour ce faire, qui de mieux que Gloria Montenegro, ancienne ambassadrice du Guatemala en France, considérée aujourd’hui comme la spécialiste de la ‘Caféologie’ française. Elle est également gérante de la Caféothèque, un charmant coffee shop du 4ème arrondissement, où nous l’avons rencontrée.

Gloria Montenegro dans son royaume du café, la Caféothèque
Gloria Montenegro au royaume du café

L’OMS va axer ses recherches sur le caractère cancérigène du café. Vous qui êtes spécialiste sur le sujet, qu’en est-il vraiment ? 

« Je crois au fait que les molécules brûlées soient cancérigènes, c’est un acquis, reconnu depuis très longtemps. Or le café est souvent non pas torréfié mais brûlé, d’où le nom des brûleries. Nous avons donc accepté que la torréfaction puisse être de ‘jeune’ à ‘poussée’, c’est-à-dire brûlée. Ces molécules brûlées sont donc en abondance dans de nombreux cafés produits autour du monde. Boire une boisson cancérigène, que ce soit une ou 10 tasses par jour, peut aussi se révéler cancérigène, bien sûr. »

Vous dédiez cependant aujourd’hui votre vie à cette boisson, le café doit donc quand même pouvoir être conçu comme un produit non cancérigène ? Peut-être même apporter des bénéfices pour la santé ? 

« J’en suis persuadée. Il suffit de respecter le degré de torréfaction suffisant pour faire une excellente boisson. Le café existe sur la planète depuis 100 millions d’années, il a surgi avec l’humanité et c’est un développeur humain, aussi bien de la concentration, que de la mémoire et de la parole, et ceci de façon immédiate. C’est un protecteur de la mémoire en particulier, la caféine se dépose sur les neurones au même endroit que la protéine de l’oubli, donc il nous protège de cette défaillance. C’est aussi un grand antioxydant, il a un effet préventif contre certains cancers, c’est donc une boisson extrêmement saine à condition de bien traiter les grains. »

Selon vous, l’OMS devrait donc s’attaquer à d’autre produits, plus prioritaires ? 

« Il me semble que oui, nombreux sont les détracteurs du café, souvent les lobbys d’autres boissons qui réagissent vivement en France pour ne pas avoir la concurrence du café. Il faut distinguer le café ordinaire ou café industriel, celui que l’on trouve partout dans les grandes surfaces, et le café fin ou café de spécialité. Celui-ci est à ‘zéro défaut’ donc ne contient pas de champignons, ni de maladies que d’autres pourraient comporter ; ils sont donc extrêmement bons pour la santé. »

Pour les plus craintifs qui suivront les conseils de l’OMS, avez-vous des alternatives au café à proposer? Maté, jus de gingembre, chicorée, sont-ils des produits qui vous tentent ? 

« Napoléon Bonaparte a voulu le faire, il voulait faire marcher ses troupes à la chicorée, mais ce n’a pas marché, il a dû racheter du café. Les USA se sont développés au café : le fait d’en donner aux gens au travail fut la base du développement économique américain, un développement caféiné. J’aimerais au contraire que les pays producteurs de café puissent avoir les moyens de boire du bon café, puisque celui-ci est dédié à l’exportation et celui qui reste, et a des défauts, est pour la consommation nationale. C’est le cas de mon pays [le Guatemala]. Je souhaiterais que cela s’arrête et que l’on consomme plus de café dans les pays producteurs. Pour ce qui est des remplacements, je n’en vois pas de véritable. »

Pour finir, pouvez-vous nous parler de votre parcours ? Comment avez-vous été amenée à vous dédier au café ?

« Mon parcours diplomatique n’a rien ajouté à ma connaissance du café, puisqu’à ce moment je me consacrais complètement à mon pays, le café m’intéressait uniquement en tant que produit d’exportation pour le Guatemala. Quand j’ai quitté mon poste d’ambassadeur en 2000, j’ai annoncé dans mes paroles d’adieux que je me reconvertissais dans la poésie et le café. Je me suis donc lancée dans des recherches en créant l’association Connaissances du Café. Auprès d’œnologues, de chefs de cuisine, et de parfumeurs, j’ai appris qu’il n’existe pas de meilleur café au monde, mais que tous les pays producteurs peuvent produire le meilleur cru. J’ai découvert que l’humanité buvait plus de 2 milliards et demi de tasses de café par jour, et que les cafés fins, de spécialité, gourmets ou de terroir augmentent de plus de 10% par an.

J’ai appris à différencier la nombreuse désinformation sur ce produit des faits scientifiques, notamment qu’il peut être torréfié noir ce qui est cancérigène. Au bout de 5 ans j’ai considéré que le fruit était mûr et qu’il fallait créer une entité commerciale, c’est ainsi que la Caféothèque est née le 15 septembre 2005, elle a donc 10 ans. »

Gloria Montenegro est aujourd’hui présidente de l’académie de ‘Caféologie’ de Connaissances du Café et gérante de la Caféothèque, que vous pouvez visiter au 52 rue de l’Hôtel de Ville.

Anna Thiau Pereira

 

 

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