Les maillots de bain intégraux, ou burkinis, ont été interdits à Grenoble, dans le sud-est de la France. C’est ce qu’a décidé la plus haute juridiction administrative du pays par une décision connue ce mardi 21 juin. Le tribunal a estimé que l’utilisation de vêtements viole le principe de neutralité religieuse. L’ONU craint l’augmentation de la stigmatisation de la communauté musulmane avec ce type de décision.

Le plus haut tribunal administratif de France a décidé que les maillots de bain complets, y compris les burkinis, ne devraient pas être portés dans les piscines publiques de la ville de Grenoble, dans le sud-est de la France, confirmant une ordonnance antérieure d’un tribunal inférieur.

La décision intervient après que le bureau du maire de la ville a voté en mai en faveur de permettre aux personnes qui souhaitent utiliser ce type de costume de le faire. Cependant, le préfet de la ville – haute autorité gouvernementale – a bloqué cette décision en assurant qu’elle allait à l’encontre du principe français de laïcité, qui promulgue que l’appartenance religieuse doit être une affaire privée. Un point de vue qui a été validé ce mardi par la justice du pays.

Le burkini est un type de vêtement dont le nom vient de la combinaison de « burqa » (voile islamique) et de « bikini ». Ces costumes cherchent à maintenir les croyances des femmes musulmanes, qui portent généralement des maillots de bain qui couvrent tout le corps, ne laissant que les mains et les pieds visibles.


En ce 4 août 2016, photo d'archive réalisée à partir d'une vidéo, Nissrine Samali, 20 ans, plonge dans la mer vêtue d'un burkini, à Marseille, dans le sud de la France.
En ce 4 août 2016, photo d’archive réalisée à partir d’une vidéo, Nissrine Samali, 20 ans, plonge dans la mer vêtue d’un burkini, à Marseille, dans le sud de la France. © AP

La France compte la plus importante minorité musulmane d’Europe, estimée à cinq millions de fidèles. En 2010, le voile niqab et la burqa ont été interdits en public. En 2016, des tentatives ont été faites pour interdire l’utilisation du burkini sur les plages publiques du pays.

Il existe actuellement certaines villes qui autorisent le port du burkini dans les piscines publiques, comme Rennes, qui a une réglementation plus souple et autorise les femmes à porter des maillots de bain complets en public.

Un débat social et politique

Bien que ce type de costume soit utilisé par un faible pourcentage de femmes en France, c’est une question qui génère de fortes confrontations politiques, notamment dans les partis de droite et d’extrême droite.

La dirigeante d’extrême droite Marine Le Pen a déclaré qu’elle souhaitait introduire une loi interdisant le burkini dans toutes les piscines publiques du pays.

A travers un communiqué, le Conseil d’Etat a assuré que cette mesure vise à maintenir « la neutralité des services publics ».

La France a des règles vestimentaires strictes dans les piscines publiques pour maintenir l’hygiène, comme l’utilisation de bonnets et l’interdiction des maillots de bain amples ou des vêtements très volumineux.

A l’issue de la prise de décision par le Conseil d’Etat, Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, a déclaré que cette décision est « une victoire pour notre loi ‘séparatisme’, pour la laïcité et surtout, pour la République ».

Préoccupations concernant la stigmatisation des musulmans

Le 16 mai, la mairie de Grenoble avait voté en faveur du port du burkini en public, après qu’un groupe de militants ait milité pour que l’usage de ces maillots de bain soit gratuit. Le maire de la ville avait également voté pour.


Des membres de l'association pro-burkini
Des membres de l’association pro-burkini « Alliance Citoyenne » lors d’une réunion du conseil municipal de Grenoble lors d’un vote du conseil pour autoriser ou non l’utilisation du burkini dans les piscines publiques de la ville. Photo d’archive prise le 16 mai 2022. AFP – JEFF PACHOUD

Sujet aussi controversé, l’ONU a demandé à la France de lever l’interdiction du burkini depuis 2016. Le porte-parole du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, Rupert Colville, a assuré que les interdictions « alimentent l’intolérance religieuse et la stigmatisation des musulmans ».

De même, il a qualifié « la manière dont les décrets anti-burkini ont été appliqués dans certains centres touristiques français » d' »humiliante et dégradante ».

Dans la décision de ce mardi, il a également été autorisé que les femmes nagent torse nu – sans aucun vêtement à partir de la taille -, jusqu’à présent, la mesure n’a rencontré aucune objection de la part des tribunaux.

Avec Reuters et AP

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