Un ancien président qui se met en scène en victime, une partie du pays qui fête une victoire de la démocratie, et une autre qui récuse une justice politique qui aurait dépassé les bornes : le verdict contre Nicolas Sarkozy divise l’Hexagone, observe la presse internationale.
Il ressent une “profonde injustice”, ne peut pas “accepter d’avoir été condamné pour ce qu’[il n’a] pas fait”, et n’exclut pas que “ce combat s’achève devant la Cour européenne des droits de l’homme”, même si ce serait “une souffrance pour [lui] de faire condamner mon pays”. Nicolas Sarkozy n’a pas été long à contester le verdict prononcé lundi 1er mars par le tribunal correctionnel de Paris.
L’ancien président a déjà fait appel de la décision qui le condamne à trois ans de prison pour corruption et trafic d’influence dans l’affaire des “écoutes”. Ce mercredi 3 mars, il affirme ensuite, dans une interview au Figaro, vouloir faire triompher “le droit et la justice”. Son camp s’est déployé en ordre de bataille pour dénoncer un acharnement judiciaire. Deux jours après la décision, le cas de Nicolas Sarkozy divise totalement la France, constate la presse étrangère.
Ruiner définitivement une carrière politique
“Les Républicains, son parti, le défend quand il affirme être victime des accusations infondées de magistrats et de politiciens conservateurs mus par leur animosité à son encontre”, rapporte The Times à Londres, en citant le patron du parti, Christian Jacob. Mais les critiques dépassent le cadre de l’ancien parti présidentiel : Marine Le Pen, du Rassemblement national, et Jean-Luc Mélenchon, de La France insoumise, ont en effet dénoncé une justice qui souhaiterait éliminer Sarkozy de la course à l’Élysée. L’empathie s’étend à des personnalités politiques de poids jusque dans les rangs de l’actuel gouvernement, avec le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, qui a exprimé son soutien à l’ancien président.
Pour combattre cette magistrature qui chercherait à “ruiner définitivement sa carrière politique”, le camp Sarkozy mise, outre la prise de parole de son chef, sur une riposte graduée, résume Le Temps en Suisse.
Argument 1 : l’ancien président est un justiciable comme les autres qui a plaidé solidement sa cause lors du procès en démontrant que rien ne constitue une preuve irréfutable de l’acte de corruption.
Argument 2 : les juges ne sont pas une catégorie de fonctionnaires parfaitement ‘exemplaires’ et au-dessus de tout soupçon.
Argument 3 : le fait qu’un retour aux urnes de Nicolas Sarkozy soit régulièrement évoqué ne vient pas de lui mais de l’attachement que lui portent les électeurs.
Il ne s’agit pas d’un retraité politique
L’Hexagone ressort profondément perturbé de ce verdict, constate également la Süddeutsche Zeitung en Allemagne. “Nicolas Sarkozy n’était pas un retraité de la politique, il était des plus actifs dans les cercles qui comptent à Paris. Par conséquent, il ne se trouve personne pour prétendre que la condamnation de Sarkozy est dépourvue de dimension politique”, estime le quotidien de centre gauche.
Et si toute une partie de l’échiquier politique récuse une justice qui dépasse les bornes, une autre célèbre une victoire de la démocratie et de la transparence. Position que le Guardian résume en ces termes : “C’en est bien fini des égards dont bénéficiaient depuis l’après-guerre les pratiques douteuses de l’élite du pays, passée et présente.”
Deux camps irréconciliables et des réactions qui révèlent surtout un état de faits, conclut la SZ : “Nicolas Sarkozy va continuer à jouer un grand rôle dans la vie politique.”