Asia Times regrette que certaines institutions financières continuent de financer les entreprises liées à l’armée birmane pourtant accusée de génocide par les Nations unies.
La transition birmane, après cinquante années de gouvernement militaire, se fait progressivement, écrit Asia Times. En dépit de la dissolution de la junte en 2010, l’armée, connue sous le nom de “Tatmadaw”, conserve un pouvoir politique et économique important. Un quart des sièges du Parlement sont réservés à des militaires.
Certes, depuis le retour progressif à un régime démocratique, Aung San Suu Kyi et son parti, la Ligue nationale pour la démocratie, ont remporté à deux reprises, en 2015 et 2020, les élections législatives, soulignant le souhait de la majorité des Birmans de tourner le dos à l’armée.
Mais, cette dernière, note le site, contrôle plusieurs conglomérats à la puissance économique essentielle. Des groupes ayant prospéré durant des années grâce à la corruption et au népotisme. Asia Times rappelle que, même si les sanctions économiques internationales imposées durant la junte ont été levées, les Nations unies préconisent d’éviter les relations commerciales avec l’armée.
Certaines entreprises étrangères font fi de telles recommandations, regrette Asia Times, s’appuyant sur des informations publiées dans The Guardian. Il en est ainsi notamment pour deux banques britanniques, HSBC et Standard Chartered, qui prêtent environ 55 millions d’euros à une entreprise vietnamienne construisant en Birmanie le réseau de téléphonie mobile de Mytel, détenu à 28 % par la Myanmar Economic Corporation (MEC), elle-même contrôlée par l’armée. La compagnie israélienne Gilat Satellite Networks travaillerait elle aussi avec Mytel.
Responsables d’un génocide
“L’appel des Nations unies contre les relations d’affaires avec l’armée fait suite aux opérations militaires de 2016 menées en Arakan contre l’Armée de secours aux Rohingyas de l’Arakan (Asra), un groupe d’insurrection”, rappelle Asia Times. Les enquêtes menées par les Nations unies au sujet des atrocités commises contre les civils rohingyas ont conduit l’organisation à demander que le chef de l’armée, Min Aung Hlaing, et cinq autres commandants soient poursuivis pour génocide.
En septembre 2019, la mission formée par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a appelé les entreprises étrangères à rompre tout lien avec celles contrôlées par l’armée birmane, et en particulier MEC et Myanmar Economic Holding Ltd (MEHL). “Ces deux entités bénéficiaient d’un quasi-monopole dans de nombreux secteurs durant la junte. Elles ont accumulé des terrains et des intérêts dans l’industrie, la construction, l’immobilier, la finance, les assurances, les télécommunications et les mines.”
Ne pas se cacher derrière des sous-traitants
“Entreprendre en Birmanie sans être en lien avec des intérêts liés à l’armée n’est pas tâche aisée, reconnaît Asia Times. L’accès au foncier ou à l’immobilier est particulièrement complexe tant une grande partie en est détenue par des entreprises” proches de l’armée. Mais, poursuit le site, faire des affaires avec les “conglomérats liés à l’armée est moins nécessaire que par le passé. Et le recours à des sous-traitants ne devrait pas défaire les investisseurs de leurs responsabilités s’ils participent à l’enrichissement des responsables d’un génocide”.