Le président français a franchi une nouvelle étape pour garder en mémoire la participation des Harkis pendant la guerre d’Algérie. Lors d’une réception à l’Elysée, le président a annoncé un acte de reconnaissance et de réparation pour ces ex-combattants algériens qui étaient aux côtés de l’armée française et qui ont été oubliés pendant des décennies.

Lundi 20 septembre, le président Emmanuel Macron a présidé une réception dédiée aux anciens combattants dits « Harkis » qui ont combattu aux côtés de l’armée française pendant la guerre d’Algérie (1954 – 1962). Lors d’un discours, le président a annoncé une loi de « reconnaissance et réparation ».

« Le gouvernement présentera avant la fin de l’année un projet visant à inscrire dans nos lois la reconnaissance et la réparation des Harkis », a déclaré le chef de l’Etat, demandant leur pardon.

« Je veux remercier les combattants, nous ne les oublierons pas », a-t-il ajouté. « La France a failli à ses devoirs envers les Harkis, leurs femmes, leurs enfants », a-t-il insisté.

« La France leur a lâché la main et leur a tourné le dos »

Le chef de l’Etat français a rappelé qu’environ 200 000 Harkis ont porté les couleurs de la France pendant la guerre d’Algérie et ont rendu « un service imminent ». Mais leur accueil en France à la fin du conflit « n’a pas été digne » et la moitié d’entre eux ont été « garés dans des camps ».

« Le sort des Harkis était terrible, exclus, asservis, handicapés, exilés de leur patrie, moqués dans leur terre d’accueil », a résumé Emmanuel Macron. « Pour vous et vos familles, c’était un abandon », a-t-il reconnu. « La France a lâché la main et leur a tourné le dos », a déclaré le président français.

Environ 300 personnes étaient conviées à la cérémonie à l’Elysée : des Harkis d’un âge avancé mais aussi leurs descendants, chefs d’associations et personnalités.

La réception a eu lieu cinq jours avant la Journée nationale d’hommage aux Harkis, qui est célébrée tous les 25 septembre depuis 2003, notamment dans le sud de la France, où la communauté est nombreuse.

Une loi obligée de reconnaître « l’abandon des Harkis »

Pendant la guerre d’Algérie, près de 200 000 Algériens ont été recrutés comme auxiliaires de l’armée française. Quand tout fut fini, certains d’entre eux, abandonnés par Paris, furent victimes de représailles en Algérie.

Plusieurs dizaines de milliers de personnes, souvent accompagnées de femmes et d’enfants, ont été transférées en France, où elles ont été placées dans des « camps de transit et de reclassement » avec des conditions de vie traumatisantes et indignes.

Depuis, « la République a pris des mesures : diverses procédures d’indemnisation se sont installées au fil du temps », a rappelé un conseiller à l’Elysée.

Suite à certains gestes, jugés insuffisants par les associations Harkis, ils ont demandé dans une lettre ouverte à Emmanuel Macron qu’une « loi reconnaissant l’abandon des Harkis » soit votée avant la fin de l’année.

« Nous vous avons vu avoir le courage de reconnaître des pages sombres de notre histoire, à propos de la guerre d’Algérie, du Rwanda ou des essais nucléaires en Polynésie. Nous espérons que vous êtes celui qui met fin à 60 ans d’une certaine hypocrisie et qui consiste à reconnaître le abandon des Harkis dans les discours, mais rejeter le fait dans une loi », a déclaré l’Association Justice Information Réparation pour les Harkis (Ajir) dans la lettre.

Les associations, qui prétendent représenter une communauté d’environ 400 000 personnes (harkis et descendants), ont également réclamé une augmentation des indemnisations existantes.

En septembre 2018, la secrétaire d’État aux Armées, Geneviève Darrieussecq, a présenté le « plan Harkis » qui comprenait le déblocage de 40 millions d’euros sur quatre ans pour revaloriser les retraites des anciens combattants et aider ceux de leurs enfants qu’ils vivent dans la précarité. .

Répartition des Légions d’honneur

Emmanuel Macron avait précédemment annoncé qu’il s’adresserait aux Harkis en recevant, en janvier, le rapport de l’historien Benjamin Stora dans le but de promouvoir « l’apaisement des mémoires » entourant la guerre d’Algérie et qu’elle reste « une plaie ouverte ». les deux rives de la Méditerranée.

Lors de la réception, le président a décoré Salah Abdelkrim, un représentant Harki blessé au combat, le général français François Meyer, qui a organisé le rapatriement « de plusieurs centaines de harkis », et une fille de Harki, Bornia Tarall, « militante pour l’égalité des chances et la diversité » .

Après avoir eu plusieurs initiatives (sur Maurice Audin, l’ouverture des archives ou le meurtre de l’avocat Ali Boumendjel), Macron entend encore participer à deux journées commémoratives au terme de son quinquennat : la répression par la Police française lors d’une manifestation d’Algériens à Paris le 17 octobre 1961 et la signature des accords d’Évian le 18 mars 1962 qui consacrent la défaite française en Algérie.

Les rencontres sont politiquement sensibles à l’approche des élections présidentielles d’avril 2022, où les Harkis représentent un électorat traditionnellement courtisé par le parti Agrupación Nacional et la droite.

Cet article a été adapté de son original en français

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