Pour Emmanuel Macron, le temps de la disgrâce

Après une ascension fulgurante, le ministre de l’Economie semble aujourd’hui isolé au sein de l’exécutif et ne devrait plus pouvoir réformer d’ici 2017.

Coincé entre le ministère du Logement et celui de la Culture dans l’ordre protocolaire du gouvernement depuis le remaniement, sa loi Noé (pour « Nouvelles opportunités économiques ») absorbée par deux autres textes, Emmanuel Macron ne semble plus en odeur de sainteté auprès du couple exécutif. A peine plus d’un an avant la fin du mandat de François Hollande, le ministre de l’Economie apparaît plus que jamais affaibli. Et les réformes qu’il promettait encore récemment risquent fort d’être enterrées.

La loi Noé au placard

« La France est un pays qui se réforme pendant les dix-huit mois après l’élection présidentielle », rappelle Pascal Terrasse, député socialiste de l’Ardèche et proche d’Emmanuel Macron, convaincu que l’hôte de Bercy n’aura plus l’occasion de présenter de nouveaux textes d’ici l’année prochaine. « La macronisation du gouvernement est réelle », tempère cependant la politologue Virgnie Martin, pour qui la politique économique du gouvernement est « raccord » avec les idées du ministre.

Tout avait pourtant bien commencé. La loi Macron, adoptée en juillet, se voulait la première pierre d’un grand édifice législatif porté par Bercy. Il n’en sera rien. Au placard, la loi Noé ! Finalement, le texte sera incorporé à deux autres projets, la très contestée réforme du Code du travail, de Myriam El Khomri et le projet de loi sur la transparence financière porté par le ministre des Finances Michel Sapin. Une nouvelle preuve que Macron irrite jusqu’au sommet de l’État.

Macron ne représente « pas grand-chose politiquement »

La faute notamment à ses nombreuses sorties, dont la dernière en date, sur la déchéance de la nationalité, en plein examen du texte à l’Assemblée nationale, a provoqué l’ire des proches de Manuel Valls. Pourtant, « sa position est en ligne avec ses convictions », défend Pascal Terrasse, pour qui Emmanuel Macron a au contraire réalisé une bonne opération, en ralliant le camp des frondeurs. Mais à quelques heures du remaniement, la pilule n’est pas passée dans l’exécutif. Non seulement le périmètre du ministère n’est pas élargi, comme cela avait pu être évoqué mais surtout, le ministre recule dans l’ordre protocolaire. « François Hollande pouvait déclasser Emmanuel Macron sans risque, parce qu’il ne représente pas grand-chose politiquement », assure Virginie Martin. De son côté, le député de l’Ardèche raille une manière de « donner des gages à la gauche archaïque », symbolisée notamment par l’entrée au gouvernement des écologistes. Quasiment sur la touche, le jeune ministre pourrait être contraint d’attendre sagement la fin du quinquennat.

Sa marge de manœuvre d’ici là ? « Aucune ! », estime Pascal Terrasse. Le parlementaire se dit certain que le ministre devra se contenter de gérer les affaires courantes, sans formuler aucune proposition nouvelle. Une position « difficilement tenable » jusqu’à la fin du quinquennat selon lui. Le député estime même que Macron, « qui dérange par son discours politique » aurait dû, comme Christiane Taubira, « en tirer les conséquences » au moment de la polémique sur la déchéance de la nationalité. Il ne l’a pas fait, pour le moment.

Hadrien Bect

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