Les Français doivent élire leur président le 10 avril, ou, en cas de second tour, le 24 avril, pour un mandat de cinq ans. Mais quels sont exactement les pouvoirs du chef de l’Etat ? France 24 fait le point.

Après les nombreux bouleversements de la IVe République, le général de Gaulle, qui reconquiert le pouvoir en 1958, en pleine guerre d’Algérie, veut instaurer un régime stable et le fait avec la Constitution de la Ve République.

Promulguée le 4 octobre 1958 puis révisée en 1962 pour permettre l’élection du Président de la République au suffrage universel direct, la Magna Carta instaure un pouvoir exécutif fort en accordant au chef de l’État de nombreux pouvoirs.

France 24 explique en quoi consistent ces pouvoirs, en vue des élections présidentielles des 10 et 24 avril 2022.


Les élections présidentielles françaises auront lieu les 10 et 24 avril 2022. Qui succèdera à Emmanuel Macron à l'Elysée ?  Pour suivre les candidats et comprendre les grands enjeux de l'élection, suivez notre couverture.
Les élections présidentielles françaises auront lieu les 10 et 24 avril 2022. Qui succèdera à Emmanuel Macron à l’Elysée ? Pour suivre les candidats et comprendre les grands enjeux de l’élection, suivez notre couverture. ©France 24
  • Chef de l’armée et de la diplomatie

Bien que la Constitution attribue une compétence partagée entre le président et le premier ministre dans les domaines de la défense et de la diplomatie, ces questions sont devenues en pratique des « domaines réservés » du chef de l’Etat. Ce dernier est garant de l’indépendance nationale et de l’intégrité territoriale (article 5) et, en tant que chef des armées (article 15), préside les différents conseils et comités supérieurs de la défense nationale qui définissent les orientations de la programmation militaire, de la dissuasion, de la conduite des opérations extérieures et de la lutte contre le terrorisme. De plus, il ne décide que de l’usage de la force nucléaire.

Cependant, le chef de l’État ne peut pas déclarer la guerre seul. L’article 35(1) stipule que « la déclaration de guerre est autorisée par le Parlement ». Cette disposition n’a pas été appliquée jusqu’à présent. Cependant, le président décide des interventions armées à l’étranger. Le gouvernement dispose de trois jours pour informer le Parlement, qui doit décider de prolonger ou non l’intervention au bout de quatre mois.

Le président de la République est aussi le chef de la diplomatie française. Il rencontre les chefs d’État étrangers et représente la France à l’international, tant dans ses déplacements à l’étranger que dans les grandes institutions. Elle est également garante du respect des traités (article 5) qu’elle négocie et ratifie (article 52). Enfin, il a le pouvoir de nommer et d’accréditer les ambassadeurs de France à l’étranger.

La Constitution et l’élection au suffrage universel direct accordent au président de la République d’importantes prérogatives pour diriger la France. Élu sur la base d’un programme présenté aux Français lors de la campagne électorale, le président est le véritable chef de l’exécutif.

Il nomme son Premier ministre et peut le révoquer. Il préside le Conseil des ministres, promulgue les lois, peut soumettre un projet de loi à référendum et a le pouvoir de dissoudre l’Assemblée nationale. C’est donc le chef de l’État qui dicte le programme de réformes à son gouvernement. Il a également le pouvoir de convoquer le Parlement en session extraordinaire pour délibérer sur un ordre du jour déterminé (article 29).

Plus que le texte constitutionnel lui-même, c’est l’exercice du pouvoir qui a donné toute son importance au rôle du président de la République. Dès le départ, Charles de Gaulle, premier président de la Ve République, s’érigea en « monarque républicain », comme le disait le juriste et professeur de droit Maurice Duverger en 1974. Mais la réforme de l’an 2000, qui réduisit la durée du mandat de sept à cinq ans, et l’inversion du calendrier électoral en 2002 – les élections législatives succèdent aux présidentielles – ont également eu un impact sur la prééminence du rôle présidentiel, puisque ces deux innovations du XXIe siècle réduisent drastiquement les risques de la cohabitation. Désormais, et jusqu’à preuve du contraire, le chef de l’Etat nouvellement élu dispose, quelques semaines plus tard, d’une confortable majorité.

Outre les pouvoirs décrits ci-dessus, le Président de la République dispose de certains pouvoirs dits « partagés » qui nécessitent la signature du Premier ministre ou du ministre correspondant. Premièrement, il y a le pouvoir de nomination. Les conseillers d’État, le grand chancelier de la Légion d’honneur, les ambassadeurs, les hauts conseillers de la Cour des comptes, les préfets, les représentants de l’État dans les collectivités d’outre-mer – régies par l’article 74 et en Nouvelle-Calédonie – les officiers généraux, les recteurs d’académies et les les directeurs des administrations centrales sont nommés par le Conseil des ministres.

Le chef de l’État partage également le pouvoir réglementaire avec le Premier ministre. Il signe des ordonnances et des décrets qui lui permettent d’établir des normes dans les domaines où la loi n’est pas nécessaire.

En matière de justice, le président a le droit d’accorder une grâce pour réduire ou supprimer la peine d’un prisonnier (article 17). Le décret de grâce doit être contresigné par le Premier ministre et le ministre de la justice.

  • Les pouvoirs exceptionnels de l’article 16

En cas de « menace grave et immédiate » contre « les institutions de la République, l’indépendance de la Nation ou l’intégrité de son territoire » entraînant l’interruption du « fonctionnement régulier des pouvoirs publics », le président de la République peut se prévaloir de l’article 16 de la Constitution, qui lui confère des « pouvoirs exceptionnels » : il lui permet d’avoir les pleins pouvoirs exécutifs et législatifs.

Cependant, pour la mettre en pratique, le chef de l’Etat doit préalablement consulter le Premier ministre, les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, et le Conseil constitutionnel, puis en informer la Nation par un message. Depuis la révision constitutionnelle de 2008, 30 jours après l’exercice des pouvoirs exceptionnels, « le Conseil constitutionnel peut être interrogé » par le président de l’Assemblée nationale, le président du Sénat, 60 députés ou 60 sénateurs, « afin d’examiner si les conditions établies au premier alinéa continuent d’être remplies ». Vous donnerez votre avis dès que possible dans une annonce publique. Après 60 jours, le Conseil constitutionnel procédera à cet examen sans qu’il soit besoin de le soumettre.

Jusqu’à présent, l’article 16 de la Constitution n’a été appliqué qu’une seule fois : par le général de Gaulle, du 23 avril au 29 septembre 1961, après la tentative de coup d’Etat militaire, dit aussi « coup des généraux » à Alger.

*Article traduit de son original en français

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