Jean-Luc Martínez, ancien directeur du célèbre musée du Louvre, a été accusé de blanchiment d’argent présumé et de complicité d’escroquerie en bande organisée dans une affaire de trafic d’antiquités. Les œuvres en question impliquent le Louvre à Abu Dhabi et le Metropolitan Museum à New York. Martínez a été libéré, mais reste sous contrôle judiciaire.

L’ancien président du musée du Louvre, aujourd’hui ambassadeur de la Coopération internationale dans le domaine du patrimoine, fonction octroyée par le ministère français de la Culture, a été interpellé et poursuivi pour blanchiment d’argent et complicité d’escroquerie en bande organisée dans le cadre d’une enquête trafic d’antiquités.

Selon le journal Le Canard Enchaîné, les enquêteurs cherchent à savoir si Martinez a « fermé les yeux » sur les faux certificats d’origine de cinq antiquités égyptiennes, dont une stèle en granit rose du pharaon Toutankhamon, acquise par le Louvre Abou Dabi (un antenne du Musée de Paris) pour 15,2 M€.

Les autorités enquêtent sur l’origine de la pièce, acquise en 2016 et dont l’origine a été mise en doute par le professeur Marc Gabolde, de l’université Paul-Valéry de Montpellier. Pour Gabolde le parfait état de la stèle est « inhabituel pour un roi dont les bâtiments, à l’exception de sa tombe, ont été martelés », une conclusion soulignée dans une enquête de 47 pages publiée dans « Revue d’Egyptologie » en mars 2020. .

Gabolde espère, comme il le souligne dans le journal Le Monde, que ses collègues du Louvre ont été victimes de cette arnaque et ne sont pas des trafiquants.

Jean-Luc Martinez, archéologue et historien de l’art, qui a dirigé le Louvre entre 2013 et 2021, a été interpellé, lundi 23 mai, au siège de l’Office central de lutte contre le trafic de biens culturels (OCBC) et inculpé de charges préliminaires . dans la nuit du 25 mai. Bien qu’il ait été libéré, il reste sous contrôle judiciaire.

Avec lui, selon le parquet de Paris, deux égyptologues français de renom ont été arrêtés : le conservateur du département des antiquités égyptiennes du Muséum, Vincent Rondot, et l’égyptologue Olivier Perdu, tous deux libérés sans inculpation mardi soir.

Les origines de l’enquête

Dans l’enquête, plusieurs marchands d’art et experts sont soupçonnés d’avoir produit de faux documents pour inventer les origines de pièces volées dans différents pays du Moyen-Orient lors des émeutes du soi-disant printemps arabe.

Dans l’article publié ce jeudi 26 mai par le journal Le Monde, il est précisé qu' »aux yeux des juges, se pose un grave problème de provenance, prétendument manipulé par l’expert en antiquités Christophe Kunicki et le marchand Roben Dib. Les chercheurs soupçonnent d’avoir produit de faux documents et inventé des origines pour « blanchir » des centaines d’objets archéologiques pillés dans différents pays du Moyen-Orient. »

Précisément dans le collimateur de la police se trouve Kunicki, spécialiste en archéologie et inculpé il y a deux ans pour l’origine de la documentation de la stèle de granit rose du pharaon Toutankhamon.

Kunicki travaillait pour la maison de ventes aux enchères Bergé & Associés – également visée par les enquêtes – et les autorités le traquent depuis qu’il a vendu en 2017 le sarcophage en or de Nedjemankh pour 3,5 millions d’euros au Metropolitan Museum de New York.


Le cercueil doré qui contenait autrefois la momie de Nedjemankh est exposé au Musée national de la civilisation égyptienne, au Caire, en Égypte, le 1er octobre 2019.
Le cercueil doré qui contenait autrefois la momie de Nedjemankh est exposé au Musée national de la civilisation égyptienne, au Caire, en Égypte, le 1er octobre 2019. © Mahmoud Bakkar/Photo d’archives/AP

L’expert assurait, à l’époque, que l’œuvre avait légitimement quitté l’Égypte en 1971 mais une enquête a prouvé qu’elle avait été volée lors du soulèvement contre le président égyptien Hosni Moubarak en 2011, et qu’elle avait été restituée au pays en 2019 après une enquête internationale impliquant aux États-Unis, en France, en Égypte et en Allemagne.

Selon Le Monde, le sarcophage serait passé entre les mains de Roben Dib, un marchand hambourgeois qui alimentait les ventes aux enchères de Christophe Kunicki.

Et ce sont justement, rapporte le journal, les mêmes protagonistes qui ont proposé la stèle de granit, en 2016, à la commission d’acquisition du Louvre Abu Dhabi.

Avec AP, EFE et médias locaux

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