Naveed a vingt-cinq ans. Il est bangladais, et vend des roses dans les rues de Paris. Un soir, il voit un homme s’étouffer dans la rue, et procède à une trachéotomie d’urgence, retrouvant des réflexes appris à la faculté de médecine. Naveed est le personnage du court-métrage Paki’s Flowers, présenté vendredi 6 novembre 2015 au Festival Cinéma et Droits Humains d’Amnesty International à Paris. Monomania a posé quelques questions à son réalisateur, Nas Lazreg.
Comment vous êtes-vous intéressé aux vendeurs de roses?
J’ai commencé mes études à Strasbourg, et je les ai continué à Paris. Quand je suis arrivé, je les ai tout de suite remarqué. Quand je passais des soirées à me balader dans la ville, je retrouvais les mêmes de quartiers en quartiers, alors que j’avais pris le bus ou le métro. Et je me suis demandé qui ils étaient. Je voulais savoir qui étaient ces fantômes urbains, qui sont là et en même temps qui ne sont pas là.
Pourquoi en faire un court-métrage?
Le déclic est arrivé en 2009. J’étais dans un bar avec des amis, deux vendeurs de roses sont arrivés et on a engagé la conversation avec eux. Je ne sais pas pourquoi ils ont pris le temps de parler avec nous ce soir là, ça devait leur faire plaisir. Au bout d’une heure de discussion, je me suis rendu compte que l’un d’eux avait fait des études d’ingénieurs, et que l’autre avait été comptable. J’ai eu envie de raconter leur histoire. Mais c’est une fiction, j’ai créé le personnage de Naveed en m’inspirant de vrais parcours.
Qu’est-ce qui vous touche dans ces parcours?
Cette histoire, ça fait partie de mon histoire. L’humain est par essence migrant, il va partout. Les histoires d’immigrant sont au fond les mêmes. Un des acteurs du court-métrage qui est un vrai vendeur de roses, je lui parlais en dialecte algérien. Comme il est musulman il connait un peu d’arabe classique, et on se comprenait comme ça.
Dans le film, il y a une scène où des gens attablés en terrasse se moquent de Naveed, en l’appelant « paki » justement. Montrer ces situations au cinéma, ça change quoi?
Le meilleur compliment qu’on puisse faire au film c’est de me dire “je n’agirai plus comme ça avec les vendeurs de roses”. Je voulais dénoncer les clichés. Mon but c’est que les gens s’identifient, parce que quand on les observe, ils sont nous. Le cinéma permet parfois comme un miroir de se poser, et de voir mieux des choses que l’on connaît.