Le président français, Emmanuel Macron, est pleinement conscient que les relations avec le Maroc et l’Algérie ne vivent pas leur meilleur moment et c’est pourquoi, lundi, il a exprimé sa volonté expresse de sortir de cette période et des « polémiques » qui, selon lui, , Ils l’ont motivé, même s’il reste à voir si son message conciliant parvient à Rabat et à Alger.

Lors de son discours de présentation de la nouvelle politique de la France envers l’Afrique, Macron a notamment évoqué la relation avec ces deux pays du Maghreb, déclarés ennemis mutuels et avec lesquels Paris entretient une relation qui n’est pas sans heurts, notamment avec l’Algérie.

« On va avancer, la période n’est pas la meilleure mais ça ne m’arrêtera pas », a souligné le président français. Concernant le Maroc, il a assuré que sa volonté est de « vraiment avancer ». « Le roi le sait, nous avons eu de nombreuses discussions », a déclaré Macron, soulignant qu’il avait des « relations personnelles amicales » avec Mohamed VI.

Cependant, a-t-il déploré, « il y a toujours des gens qui essaient d’accorder trop d’importance aux incidents, aux scandales au Parlement européen, aux questions d’écoutes téléphoniques qui ont été révélées par la presse ». « Est-ce l’affaire du gouvernement français ? Non. Est-ce que c’est la France qui a mis de l’huile sur le feu ? Non », a affirmé Macron, pour qui « il faut avancer malgré ces polémiques ».

PEGASUS ET LE VOTE A L’EUROCHAMBRE

Le président français a tenté par ces mots de réduire les tensions avec le Maroc sur deux sujets qui ont contribué à envenimer les relations. Le premier d’entre eux, le prétendu espionnage avec le logiciel ‘Pegasus’ dont lui-même et d’autres ministres auraient été victimes en 2021 et derrière lequel, selon ce que la presse révélait à l’époque, se trouverait le Maroc.

Le second d’entre eux est l’approbation au Parlement européen en janvier dernier d’une résolution mettant en cause le respect des droits de l’homme, et en particulier la liberté d’expression, et dans laquelle un prétendu stratagème de corruption a été dénoncé par le Maroc pour gagner du poids politique auprès des députés.

La résolution, la première contre le royaume alaouite en 25 ans, a provoqué un séisme politique au Maroc et conduit son Parlement à reconsidérer ses relations avec le Parlement européen. De même, des eurodéputés français en ont été tenus responsables, et plus particulièrement le chef du groupe Renew, Stéphane Sejourné, membre du parti de Macron et considéré comme très proche du président.

Le média le360.ma, considéré comme très proche de la Maison royale alaouite, a publié mardi un article sévère, accusant Macron de « minimiser la crise profonde » que traverse la relation bilatérale et de vouloir voir « passer une tempête ». dans ce qui se passe.

L’auteur de l’article rend particulièrement moche l’usage du mot polémique pour désigner les « divergences profondes » qui existent entre les deux pays et qui « sont liées à une question existentielle pour les Marocains et que Macron feint délibérément d’ignorer », le Sahara occidental . « Réduire une crise à une polémique traduit à la fois une attitude condescendante du président et une fuite en avant », souligne-t-il.

LA POSITION FRANÇAISE SUR LE SAHARA

Ainsi, il est précisé qu’en réalité la crise est motivée par la position que la France a vis-à-vis de l’ancienne colonie espagnole. Rabat a clairement fait savoir ces derniers mois qu’il souhaitait que le gouvernement français suive les traces de l’Espagne, après que le président Pedro Sánchez a transféré par lettre à Mohamed VI son soutien au plan d’autonomie marocain comme « la base la plus sérieuse et la plus crédible et réaliste » pour résoudre le conflit.

Lors de sa visite à la mi-décembre, vraisemblablement pour préparer le voyage de Macron à Rabat pour début 2023 et pour lequel il n’y a toujours pas de date, la ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna a précisé dans une interview que la France ne changera pas pour ce que font les autres. « Notre position est claire et connue. Dès le départ, c’est une position clairement favorable au Maroc », a-t-il dit, rappelant le soutien au plan d’autonomie.

Mais Rabat ne cède pas. Le Premier ministre, Aziz Ajanuch, a profité d’une interview dans un journal français en janvier dernier pour défendre que « Paris ne peut pas être simplement observateur » alors que « de grandes évolutions dans la reconnaissance, par les grandes puissances, de la souveraineté du Maroc sur nos Provinces du Sud » , faisant référence au Sahara.

De plus, selon ce que souligne le360, le Maroc serait désormais prêt à ouvrir un autre front. Selon l’auteur de l’article, la France porte « une forte responsabilité » dans le différend entre Rabat et Alger puisqu’elle a « outrageusement élargi les frontières de l’Algérie française, amputant de vastes territoires au Maroc ». « La vérité sur la période coloniale que réclame le président français passe aussi par la réparation des dégâts que la France a infligés au Maroc », souligne-t-il.

AVANCER AUSSI AVEC L’ALGÉRIE

S’agissant de l’Algérie, Macron a également exprimé sa volonté d’aller de l’avant et a déclaré qu’il savait pouvoir compter sur « l’amitié et l’engagement du président (Abdelmayid) Tebune », qu’il avait rencontré lors de sa visite en août dernier et qu’il prévoyait de visiter. La France en principe en mai prochain.

Toujours dans cette affaire, le président français a évoqué « une polémique sur le retour en France d’un Franco-Algérien de Tunisie, avec beaucoup de choses qui se sont dites et un discours qui s’est construit » sur cette affaire, en référence à la militante de l’opposition Amira Buraui.

Début février, l’Algérie a procédé à l’appel de son ambassadeur à Paris pour consultations après que les services consulaires ont réussi à éloigner Buraui de Tunisie vers la France, qui a la double nationalité et avait été détenu dans ce pays et devait initialement être renvoyé en Algérie. .

La militante avait été condamnée dans son pays pour « atteinte à la personne du président de la République », « outrage à un responsable dans l’exercice de ses fonctions » et « diffusion d’informations susceptibles de porter atteinte à l’ordre public », ainsi que « atteinte contre les préceptes de l’islam et le prophète ». Le gouvernement français a toujours défendu ses actions, affirmant qu’il fournissait une assistance consulaire à un citoyen français.

« Je pense qu’il y a beaucoup de gens qui ont intérêt à ce que ce qu’on fait depuis des années avec l’Algérie maintenant ne prospère pas », a dénoncé lundi Macron, promettant qu’il continuerait. « Ce n’est pas le premier coup de grisou, j’en ai déjà eu d’autres, mais il faut continuer comme ça, de manière humble et honnête », a-t-il déclaré, valorisant notamment « l’énorme travail sur la mémoire » réalisé ces derniers temps avec Algérie.

Dans ce cas, le message du président français semble avoir reçu un accueil moins froid qu’à Rabat. Le média ‘Tout sur l’Algérie’, proche du gouvernement, souligne que la relation entre les deux pays « évolue en dents de scie » et après les « turbulences de l’automne 2021 », après que la France a réduit le nombre de visas pour les Algériens principalement, suivi du « réchauffement » de l’été dernier et maintenant de la nouvelle crise autour de l’affaire du militant de l’opposition.

Cependant, il souligne l’harmonie et les bonnes relations entre Macron et Tebune et souligne que le président algérien a également dénoncé l’existence de « lobbies » en France « hostiles à une relation forte entre les deux pays ». Le président a évoqué la relation avec la France dans une interview qu’il a accordée vendredi à la presse algérienne, dénonçant certaines positions « inamicales » mais sans mentionner expressément l’affaire Buraui.

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