Alors que leurs écoles et crèches sont fermées depuis de longues semaines, les Allemands s’intéressent de plus près au choix français de combattre la pandémie tout en permettant aux élèves de suivre les cours en présentiel.
En Allemagne, le temps commence à être long. Mercredi 10 février, les restrictions pour lutter contre la propagation du coronavirus ont été prolongées jusqu’en mars. Quant au sort des écoles, fermées depuis la mi-décembre, il est incertain. Ne pouvant imposer sa volonté de les laisser fermées jusqu’en mars, la chancelière, Angela Merkel, a confié la responsabilité de l’ouverture ou non des établissements scolaires et crèches à chacun des 16 Länder. Nombreux sont ceux qui souhaitent rouvrir en février.
Du coup, la presse s’interroge sur “l’autre solution” pour les écoles : celle de la France, par exemple. Longtemps peu envié outre-Rhin, au vu de sa situation épidémique plus virulente et de ses restrictions bien plus dures, l’Hexagone montre aujourd’hui une voie alternative : confinement ou pas, “les écoles et les crèches resteront ouvertes aussi longtemps que possible”, explique la radio publique bavaroise BR.
Même cet automne, quand les contaminations grimpaient en flèche, l’enseignement en présentiel a été maintenu, note le média. “Au besoin, les élèves doivent porter un masque à protection élevée en classe.” Et, passé les protestations du début, tout le monde semble s’être habitué aux mesures de protection. “Mais est-ce la bonne solution ? Est-elle meilleure que celle retenue en Allemagne ?”
Un prix à payer trop élevé
Pour le gouvernement français, habitué à de virulentes critiques sur sa gestion de la crise, l’accueil positif de cette décision doit faire du bien, explique la Tagesschau. Il a reçu les félicitations des pédiatres par la voix de Roger Cohen, pédiatre et infectiologue, tandis que l’Unesco soulignait que la France était l’un des pays qui réussissait le mieux à garder les établissements scolaires ouverts, constate le site.
La raison est simple, explique la Frankfurter Allgemeine Zeitung dès son titre : “Les conséquences [d’une fermeture] sont trop graves”. À la sortie du premier confinement, le pays avait constaté “avec effroi” ce que l’enseignement à distance avait fait aux élèves, explique le quotidien. “Difficultés de concentration, recul des connaissances, voire problèmes de comportement, tel était le bilan.” Dans des quartiers difficiles, “la fermeture des cantines scolaires avait privé nombre d’enfants de leur seul repas chaud de la journée.”
C’est pourquoi le ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, défend bec et ongles son cap, “y compris contre certains membres du gouvernement. Il a le soutien de nombre de parents comme des syndicats d’enseignants.”
Sécuriser le niveau d’apprentissage de toute une génération
La clé, selon le journal : l’énorme offre française de tests de dépistage gratuits. La France en prévoit 2 900 pour 100 000 habitants, contre 1 100 en Allemagne. “Au moindre soupçon – gorge douloureuse, maux de tête –, on peut passer un test antigénique dans la plupart des pharmacies. En 15 minutes, on sait si les soupçons étaient fondés.”
Les coûts pour la sécurité sociale sont certes gigantesques, écrit la FAZ, mais le ministre argue “que le coût pour la société serait bien plus élevé à long terme si la fermeture prolongée des écoles faisait plonger le niveau de toute une génération d’élèves”.
L’Allemagne discute toujours…
Ensuite, même si en France aussi les études sur le rôle des milieux scolaires dans la propagation du virus fait débat, l’évolution statistique de l’épidémie ne permet pas de contester la décision française, note le site, rappelant que les nouveaux cas enregistrés par jour restent stables, sur un plateau haut. La radio BR renchérit :
Pendant que l’Allemagne discute, il y a longtemps que la France mise sur l’enseignement en présentiel et, en règle générale, sur une vie quotidienne plus riche. Les chiffres de l’économie, les félicitations de l’Unesco et le nombre des décès confirment les choix du gouvernement.”
La mortalité est en effet actuellement inférieure à celle de l’Allemagne, avec 169 décès pour un million d’habitants en France, contre 277 en Allemagne, explique le média.
Enfin, l’économie souffre moins, pointe BR. L’activité économique est seulement à 4 % en dessous de la normale, un résultat bien meilleur que celui de beaucoup de voisins. Et d’évoquer le dispositif de dépistage comme clé du succès, avec pourtant une grosse inconnue : “Les mutations du virus provoquent une inquiétude croissante en France comme ailleurs.”