« Vos libertés sont en péril » pouvait-on entendre mardi dernier devant le Palais de justice de Douai. Le mouvement de grève s’éteint au sein de la profession, mais ils étaient encore 450 avocats à scander leur colère.
Cela faisait trois semaines que les avocats désertaient l’aide juridictionnelle, le système qui donne accès à un avocat aux personnes modestes. Les bâtonniers, qui représentent la profession dans les territoires, refusaient systématiquement de désigner des avocats commis d’office. Sans défense, les prévenus pouvaient demander au juge le renvoi de leur audience.
La réforme de l’aide juridictionnelle consiste à élargir l’assiette des bénéficiaires de l’aide. Une mesure qui donne à 100 000 personnes supplémentaires un accès à la justice. Toute personne ayant des revenus inférieurs à 1000 € sera bénéficiaire contre 941 € jusqu’à présent. La chancellerie voulait en faire payer le prix aux avocats à hauteur de 15 millions d’euros sur deux années. Le 28 octobre, un accord a été trouvé entre la place Vendôme, le Conseil national des barreaux (CNB), la Conférence des bâtonniers et le barreau de Paris qui représentent la profession.
L’accord ne satisfait pas tout le monde. Le document est signé non pas de la main de la ministre, mais de son directeur de cabinet, démissionnaire depuis l’accord. Le Syndicat des avocats de France ainsi qu’une dizaine de bâtonniers appellent à poursuivre le mouvement. Le Syndicat juge les propositions du gouvernement « insuffisantes » et appelle à une « grève du zèle ». La grève du zèle consiste à solliciter systématiquement la collégialité des juges. Les avocats demandent que les prévenus soient jugés par trois magistrats alors qu’habituellement, les décisions se prennent par un juge unique.
Les avocats ont-ils perdu le Nord ?
Le Nord-Pas-de-Calais proteste. Quelques 450 avocats se sont réunis mardi devant le tribunal de Douai. L’accord avec la chancellerie grippe sur le barème de rémunération des avocats au titre de l’aide juridictionnelle, rémunération qui n’avait pas été réévaluée depuis 2007. Le CNB a obtenu une augmentation moyenne de 12,5 %. « C’est certes la fin de la grève dure, mais le début d’un autre mouvement de contestation, des gens qui refusent la rustine, on ne va pas se satisfaire de trois euros. On refuse le low cost judiciaire », explique Frank Dubois, bâtonnier de Douai. Le barreau de Paris a demandé au Premier ministre qu’en janvier 2016 se tiennent les premiers états généraux de l’accès au droit.